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Sur 1540 longs métrages, issus de 97 pays, Cannes 2005 présentait 53 films représentant 28 nationalités, dont 50 premières mondiales qui témoignent de la volonté de retenir des œuvres inédites. On a noté à cette occasion, la forte présence, dans la compétition et l’ensemble de la sélection, de l’Asie (Chine, Japon, Taïwan, Corée, Sri Lanka), de l’Amérique latine (Mexique, Brésil, Argentine), celle plus timide de l’Europe en compétition et celle bien mince de l’Afrique et du Proche-Orient.
Président du jury 2005, cinéaste flamboyant venu l’an dernier avec La Vie est un miracle, Lion d’or à Venise avec Te souviens-tu de Dolly Bell ? (1981), lauréat à deux reprises de la Palme d’or pour Papa est en voyage d’affaires (1985) et Underground (1995), prix de la Mise en scène pour Le Temps des gitans (1989), auteur de pépites comme Chat noir chat blanc, meneur d’un groupe de rock, Emir Kusturica qui se sent "l’âme d’un chef de troupe" a déclaré être attentif à ce que "le jury puisse exprimer son point de vue et exposer sa vision du cinéma".
Le jury, qui comptait dans ses rangs la romancière Toni Morrisson, prix Nobel de littérature 1993, les cinéastes Agnès Varda, John Woo et l’actrice Salma Hayek, devait choisir entre 20 longs métrages venus de 13 pays. Parmi eux, Don’t Come Knocking de Wim Wenders, Last Days de Gus Van Sant, Manderlay de Lars Von Trier, L’Enfant de Jean-Pierre et Luc Dardenne, Bashing de Masahiro Kobayashi, Three Times de Hou Hsiao-Hsien, Broken Flowers de Jim Jarmusch, Free Zone de Amos Gitaï et Caché de Michael Haneke qui met en scène un homme à la vie bien rangée (Daniel Auteuil), dont un acte de délation commis durant l’enfance va gâcher sa vie d’adulte ; un thriller à propos duquel le cinéaste a précisé que ce n’était pas un film sur la guerre d’Algérie, mais un film "sur un journaliste qui se déroule pendant la guerre d’Algérie" (Sortie : 12 octobre).
A côté de ces habitués de la Croisette, il fallait aussi compter avec les Chinois Wang Xiaoshuai et Johnnie To, l’Italien Marco Tullio Giordana, le Mexicain Carlos Reygadas et l’Américain Robert Rodriguez, tous en compétition pour la première fois, tout comme le célèbre acteur Tommy Lee Jones (Le Fugitif, Men in Black) venu concourir pour la Caméra d’or qui récompense le meilleur premier film. Pour avoir précédemment tourné The Good Old Boys en 1995, Tommy Lee Jones sera disqualifié pour la Caméra d’or, tout comme James Marsh auteur de The Wisconsin Death Trip en 1999 et Karin Albou de L’Innocente, un téléfilm réalisé en 2001. Cette dernière était venue à Cannes présenter La Petite Jérusalem, son premier long métrage pour le cinéma, sélectionné à la Semaine internationale de la critique.
Avec une plus nette présence européenne que dans la compétition, la section Un certain regard proposait pour sa part 23 films venus de 15 pays - dont 9 premières œuvres -, et parmi eux Marock, premier long-métrage de la Marocaine Laïla Marrakchi (Sortie : 14 décembre), et Delwende, le cinquième du Burkinabé Simon Pierre Yameogo.
Au rayon des séances spéciales, on ne pouvait éviter les projections très médiatisées de Match Point de Woody Allen et, en avant-première mondiale, du dernier épisode de Star Wars de George Lucas.
Si aucun documentaire ne figurait dans la compétition, il s’en trouvait néanmoins dans la sélection officielle. C’était le cas de The Power of nightmares du Britannique Adam Curtis, un film produit par la BBC, diffusé en janvier dernier et dont on reparlera certainement, de Nekam achat mishtey eynay (Pour un seul de mes deux yeux) de l’Israélien Avi Mograbi et de Les Artistes du théâtre brûlé du Cambodgien Rithy Panh.
Le Sénégalais Ousmane Sembène, qui succèdait en cela à Wong Kar-wai, Nanni Moretti et Stephen Frears, est venu donner sa Leçon de cinéma (15 mai). Ce fut l’occasion d’évoquer la carrière et l’oeuvre de l’un des plus grands cinéastes africains contemporains, déjà présent à Cannes en 1966 avec La Noire de ..., membre du jury longs métrages l’année suivante, de retour à Cannes en 1972 avec Emitaï, en 1977 avec Ceddo et Prix Un certain regard 2004 pour Mooladé.
Habitué du festival où il a été membre du jury long-métrages en 1993, puis consacré par une Palme d’or en 1997 pour Le Goût de la cerise, l’Iranien Abbas Kiarostami était cette année président du jury de la Caméra d’or. Il y avait aussi lieu de relever la présence, dans le jury de la Cinéfondation et des courts-métrages, du cinéaste égyptien Yousry Nasrallah venu l’an passé avec Bab el-chams (La Porte du soleil).
Suffit-il de montrer les meilleurs films de l’année ?, se sont interrogé en substance les dirigeants du festival qui ont annoncé la création de l’Atelier du festival, un programme "destiné à aider de jeunes cinéastes à faire aboutir leur projet de film". C’est ensuite à la Cinéfondation qu’est revenu le soin de sélectionner les projets "suffisamment mûrs sur le plan artistique mais "insuffisamment construits sur le plan économique pour pouvoir démarrer". Ce sont ainsi dix-huit projets de films de dix huit pays différents qui bénéficieront d’un "accompagnement jusqu’à la phase de production".
Parmi les projets de films retenus figurent ceux du Gabonnais Imunga Ivanga, du Tchadien Mahamat-Saleh Haroun et du Palestinien Tawfik Abu Wael (Atash "Soif", Cannes 2004).
Résolus à garder le cap de la diversité culturelle, les organisateurs ont annoncé l’ouverture, au cœur du village international, d’une salle baptisée Cinéma du monde. Sept pays, dont le Maroc (en ouverture le 13 mai) et l’Afrique du Sud, y ont proposé chaque jour une programmation en forme de fenêtre sur l’originalité et la vitalité de leur création. Espace de promotion des cinématographies et lieu d’accueil des producteurs d’une cinquantaine de pays, le Village international a en outre accueilli trois nouveaux pays en 2005 : l’Iran, le Liban et la Bosnie-Herzégovine.
Le Festival de Cannes, c’est aussi bien évidemment le marché du film qui devait accueillir quelque 9000 acheteurs, vendeurs et producteurs. A la rubrique montée des marches, on citera la présence des acteurs Danny Glover, Jessica Lange, Sam Shepard, Sharon Stone, Mickey Rourke, Bruce Willis et Zhang Ziyi.
Au chapitre des expositions enfin, "James Dean - Fifty years ago" de Dennis Stock, réalisée par Magnum Photos, était consacrée au célèbre acteur disparu tragiquement en 1955 dans un accident de la route en Californie. On pouvait aussi (re)voir East of Eden (A l’est d’Eden) d’Elia Kazan et Rebel Without a Cause (La Fureur de vivre) de Nicholas Ray, dans le cadre du programme Cannes Classics, et découvrir James Dean : Forever Young, un documentaire de Michael Sheridan qui revient à la courte carrière de cette icône du cinéma américain. (Voir Le Site officiel de James Dean)
Le Palmarès de Cannes 2005
– 11 - 22 mai 2005, 58e Festival international du film de Cannes |