Figure et doyenne du théâtre et du cinéma algériens, Keltoum est décédée le 11 novembre 2010 à Alger. Elle était âgée de 94 ans. Née Aïcha Adjouri, à Blida, elle a croisé la route de Mahieddine Bachtarzi qui la recrute pour un petit rôle de danseuse dans une opérette. En 1937, elle donne la réplique à Rachid Ksentini dans Mariage par téléphone et sera à l’affiche de la plupart des spectacles des fameuses "tournées Mahieddine" en Algérie, au Maghreb et en Europe.
Dans le même creuset qui a vu l’émergence de la musique et du théâtre algérien au siècle dernier, les spectacles de cabaret prenaient souvent le relai du théâtre, notamment lorsque l’autorisation de se produire était refusée ou que certains spectacles étaient tout simplement frappés d’interdiction par les autorités de la colonisation. Il est aussi arrivé que les rigueurs de la loi viennent à sanctionner la comédienne. Dans son édition du 21 mars 1950, le quotidien Alger républicain fait état d’une amende de 50 000 francs infligée à Mahieddine par la municipalité, la mise à pied durant un mois de la comédienne Keltoum et l’interdiction de se produire sur la scène de l’Opéra faite au chanteur tunisien Ali Riahi, au motif que la pièce El-Ouadjib et les chants durant la représentation comportaient des passages jugés "séditieux". (Mémoires de M. Bachetarzi)
Membre de la troupe arabe de l’Opéra d’Alger à sa création en 1947 sous la direction de Bachtarzi, aux côtés de nombreuses étoiles dont, Mohammed Touri, Djelloul Bachdjerrah, Réda Falaki et Mustapha Kateb, elle interrompt ses activités en 1956 avec la guerre d’indépendance. Elle est de retour sur scène avec la création, en 1963, du Théâtre national en compagnie de Mustapha Kateb, Mohamed Boudia, Abderrahmane Kaki, Allel el-Mouhib et Abdelkader Alloula.
Jusqu’au tournant 1990, elle aura joué dans plusieurs dizaines de pièces. Après Mort d’un commis voyageur d’Arthur Miller par Fouzia Aït El-Hadj (1987), suivie de La Maison de Bernarda Alba de Federico Garcia Lorca, dans une mise en scène de Allel el-Mouhib, sa dernière apparition remonte à 1991, avec la reprise d’El Bouaboune (Les Concierges) de Rouiched.
Elle a également fait des incursions au cinéma où elle fut à l’affiche de La Septième Porte du cinéaste français André Swobada. Le film a été tourné en 1946 à Fès (Maroc) avec, dans les rôles principaux de Leila et Ali, d’une part, Maria Casarès et Georges Marchal pour la version française et, d’autre part, Keltoum et Bechir Gabsi pour la version arabe. Elle s’illustrera surtout dans une magnifique interprétation muette et dépouillée de mère courage dans le Vent des Aurès de Mohamed Lakhdar-Hamina en 1966.
Interrogé sur sa rencontre avec la comédienne, Mohamed Lakhdar-Hamina confiera que c’est sur recommandation d’André Swobada qu’il a rencontré et choisi Keltoum pour le Vent des Aurès. Elle jouera encore dans Hassan Terro (1968), Décembre (1972) et Chronique des années de braise (1974) du même réalisateur, puis dans les Déracinés (Beni Hendel) de Lamine Merbah (1976), Le Vent du sud (Rih el-djanoub, 1975) et Hassan Taxi (1982) de Mohamed Slim Riad, Les Folles années du twist de Mahmoud Zemmouri (1986) ou encore Hassan Niya de Ghaouti Bendedouche (1989).
Figure du théâtre et du cinéma en Algérie, qui aurait aussi enregistré cinq disques, Keltoum s’est vue consacrer un hommage en mars 2010 à l’initiative de l’association des cinéastes Lumières. Malade, elle n’avait pu être présente à la cérémonie. Keltoum a été inhumée au cimetière d’El Alia.
Le Vent des Aurès de Mohamed Lakhdar-Hamina (98’)
– 12 - 13 octobre 2011, Hommage à Keltoum : "Le Vent des Aurès perd son souffle", Alger / Salle El Mouggar
– 25 - 30 septembre 2011, "Hommage à Keltoum", Festival du théâtre comique de Médéa
Aucune
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