Né à Taboudoucht, dans le village des Ath Jennad en Kabylie, Mohamed, dit M’hamed, Issiakhem (1928-1985) passe son enfance à Relizane. C’est là qu’en 1943, il manipule une grenade, ramassée dans un camp militaire américain, dont l’explosion provoque la mort de deux de ses sœurs et d’un neveu. Après deux années d’hospitalisation et plusieurs opérations chirurgicales, il se voit quant à lui amputer de l’avant-bras gauche.
À la fin des années 1940, M’hamed Issiakhem s’inscrit à la Société des Beaux-Arts d’Alger. Jusqu’en 1951, l’élève du miniaturiste Omar Racim suit les cours de l’École des Beaux-Arts d’Alger avant de faire la rencontre de Kateb Yacine.
À Paris, où il retrouve l’auteur de Nedjma, M’hamed Issiakhem expose à la galerie André-Maurice et entre à l’École supérieure des Beaux-Arts de Paris. Boursier de la Casa de Velázquez à Madrid en 1962, il préfère retourner en Algérie -indépendante depuis juillet.
A nouveau en compagnie de Kateb Yacine, il rejoint le quotidien Alger républicain où il passera deux années en tant que dessinateur. Plus tard professeur aux Beaux-Arts d’Alger et d’Oran, l’artiste a réalisé de nombreuses expositions en Algérie et à l’étranger avant de se voir décerner le premier Simba d’or de la peinture, une distinction de l’Unesco pour l’Afrique, remise à Rome en 1980.
M’hamed Issiakhem s’est éteint le 1er décembre 1985 à Alger, des suites d’une longue maladie. "Devant sa peinture, écrit le sociologue Benamar Mediene, Issiakhem est le déconcertant, le paradoxal, l’irrévérencieux démiurge, qui, dans sa lucidité prophétique avale de la poudre à canon et allume une cigarette. L’art, pour lui, est toujours un risque qui engage l’existence même de celui qui l’assume".
Son ami Kateb Yacine a déclaré l’avoir "vu, plus d’une fois, finir une toile en quelques heures, pour la détruire tout à coup, et la refaire encore, comme si son oeuvre aussi était une grenade qui n’a jamais fini d’exploser dans ses mains".
Écrivain, militant et ancien rédacteur en chef de la revue littéraire La nouvelle critique, Jacques Arnaud s’était vu offrir une toile par M’hamed Issiakhem, pendant qu’ils travaillaient sur un numéro spécial consacrée à la littérature algérienne. Intitulée "Algérie 1960", l’oeuvre a été réalisée en 1960. Décédé en 2008, Jacques Arnaud a souhaité en faire don à un musée algérien et chargé l’association Art et mémoire au Maghreb d’exécuter ses dernières volontés. La toile, qui a d’abord fait l’objet d’une opération de restauration à Paris grâce à une action de mécénat, a été remise, lors d’une cérémonie le 8 janvier 2017, au Musée national des Beaux-arts d’Alger.
Pour commémorer le 30e anniversaire de sa disparition, le 1er décembre 1985, la wilaya de Relizane organisait un hommage à M’hamed Issiakhem. A cette occasion, un salon présentait des travaux d’Azouaou Mammeri, Rachid Nacib, Adlane Djeffal, Valentina Ghanem, Arezki Larbi, Zohra Sellal, Hachemi Ameur, Lazhar Hakkar et Hellal Zoubir.
En marge du 25e anniversaire de sa disparition, M’hamed Issiakhem s’est vu consacrer une vaste exposition-hommage au Musée d’art moderne et contemporain d’Alger (Mama) qui rassemblait plus de cent toiles issues de collections publiques et privées, dont certaines n’avaient jamais été montrées au public. Outre le catalogue de l’exposition, un ouvrage intitulé A la mémoire de... M’Hamed Issiakhem, a été publié à cette occasion, sous la signature de Malika Dorbani, l’ancienne conservatrice du Musée national des Beaux-Arts d’Alger, et de Djaafar Inal, grand connaisseur et l’un des plus proches compagnons de route de l’artiste.
Google a célébré, le 17 juin 2018, le 90e anniversaire de la naissance de M’hamed Issiakhem, l’une des grandes figures de la peinture moderne en Algérie, avec un Doodle visible sur la page d’accueil du moteur de recherche au Maroc, en Algérie, en Tunisie, en Libye, en Égypte, au Liban, en Jordanie, en Irak, en Arabie saoudite et à Oman.
A l’occasion de la sortie en salles de Hors la loi de Rachid Bouchareb (sept. 2010), les 3 Cinés Robespierre de Vitry sur Seine proposaient une soirée avec une projection du film, suivie d’une discussion en compagnie des historiennes Anissa Bouayed et Ouarda Tengour. C’était en outre l’occasion de découvrir "Algérie 1960", une toile de M’hamed Issiakhem restaurée par les soins de l’association Art et mémoire au Maghreb (hall du cinéma). Cette opération de restauration a été rendue possible grâce aux mécènes sollicités avec succès par l’universitaire et critique d’art Benamar Mediene.
Durant le mois de juin 2008, le village de Taboudoucht (Commune des Aghribs, Wilaya de Tizi Ouzou), a rendu hommage à l’illustre enfant du pays. A l’initiative de l’association qui porte son nom, la manifestation, qui a réuni un grand nombre d’artistes peintres et de compagnons de route de M’hamed Issiakhem, fut également l’occasion d’une conférence de Benamar Mediene, d’un récital de poésie de Ben Mohamed et d’une projection du portrait documentaire réalisé en 1985 par Fawzi Sahraoui. Une exposition hommage a donné à découvrir les travaux des artistes participants ainsi que ceux des étudiants des Beaux-Arts d’Oran, Mostaganem, Alger et Azazga.
M’hamed Issiakhem de Fawzi Sahraoui (43 min., RTA, 1985)
– 21 septembre – 24 octobre 2024, "Trésors de la peinture algérienne" (exposition-vente), Alger / Hydra / Galerie Guessoum, 21, rue de Braza, Tel. : +213 (0)5 50 51 69 40
– 5 avril - 25 août 2024, Présences arabes. Art moderne et décolonisation. Paris 1908-1988, Musée d’art moderne de Paris – 18 mars - 31 juillet 2022, Algérie mon amour. Artistes de la fraternité algérienne, 1953-2021 : Louis Nallard, Abdelkader Guermaz, M’hamed Issiakhem, Mohamed Khadda, Baya, Choukri Mesli, Abdallah Benanteur, Souhila Bel Bahar, Mohamed Aksouh, Denis Martinez, Mahjoub Ben Bella, Rachid Koraïchi, Mohand Amara, Abderrahmane Ould Mohand, Kamel Yahiaoui, Zoulikha Bouabdellah, Halida Boughriet, El Meya, Paris / Institut du monde arabe – 31 janvier - 28 mars 2020, Artistes de la Fraternité algérienne, 1963-2020, Paris / Centre culturel algérien – 28 novembre – 14 dicembre 2018, Issiakhem : "Colori dell’amicizia" ("Couleurs de l’amitié"), Milano / Ex Fornace
– April 23 – December 24, 2016, "The Short Century", Modern works from the collection of the Barjeel Art Foundation, Sharjah Art Museum
– 1 - 3 décembre 2015, "Issiakhem à Relizane : Naissance d’une vocation", Relizane / Maison de la culture
– 18 juillet - 30 septembre 2012, "50 années d’art algérien", Alger / Musée national des Beaux Arts, Dar Essalam, El Hamma, Alger, Tel/Fax : +213 (0)21 66 49 16
– May 29 – June 27, 2014, "Sky Over The East", Abu Dhabi / Emirates Palace Gallery
– 5 mars - 10 avril 2011, "L’écorché vif", exposition à la mémoire de M’hamed Issiakhem : œuvres de Nadia Aït-Saïd, Hassane Amraoui, Liloud Chennoufi, Nour-Eddine Djoudja, Ali Kichou et Hadjira Preure, Montréal / 3e Printemps culturel nord-africain
– 1er décembre 2010 - 31 janvier 2011, "Hommage à M’hamed Issiakhem, Alger / Musée d’art moderne et contemporain d’Alger (Mama), 25, rue Larbi Ben M’Hidi, Alger, Tel. : +213 (0)21 30 21 30
– October 16, 2010, Lecture : "M’hamed Issiakhem : Anticipating Cultural Postcolonialism in Algeria" by Miloud Chennoufi (Ph.D, Professor, Royal Military College St. Jean, Toronto, Canada), North Andover [MA, USA] / Merrimack College / The Rogers Center for the Arts / Algerian Cultural Festival of Art & Music – 25 septembre 2010, Cinéville : projection de Hors la loi de Rachid Bouchareb | Exposition du tableau de M’hamed Issiakhem, "Alger 1960", restauré par l’association Art et mémoire au Maghreb (Hall du cinéma), Vitry sur Seine / Cinéma 3 Robespierre , Réservations : 01 46 82 51 12
– 6 - 7 janvier 2010, "Hommage à M’hamed Issiakhem", Université de Béjaïa, par l’association scientifique et culturelle Arts et études (ASCAE)
– 20 et 21 juin 2008, "Hommage à M’hamed Issiakhem", Taboudoucht, Commune des Aghribs (Wilaya de Tizi Ouzou)
– 28 avril - 19 juin 2008, "Les artistes internationaux et la révolution algérienne", Alger / Musée national d’art moderne et contemporain (Mama), 25, rue Larbi Ben M’Hidi, Alger, Tel. : +213 (0)21 30 21 30
– 5 septembre - 12 octobre 2007, "Art contemporain arabe", Alger / Palais de la culture Moufdi-Zakaria
– 17 juillet - 24 août 2003, "Le XXème siècle dans l’art algérien", Paris / Orangerie du Sénat
– 4 avril - 15 juin 2003, "Le XXème siècle dans l’art algérien", Marseille / Château Borély
– 30 janvier - 25 février 2003, M’hamed Issiakhem et Kateb Yacine, Peintures, dessins et correspondance, Paris / Unesco, salles Miro 1 et 2
Bibliographie :
–Issiakhem. La place de l’art contemporain dans les pays émergents (catalogue)
(Alger, Mama/Fiac, 2010)
–M’hamed Issiakhem. A la mémoire de...
Sous la direction de Djaafar Inal
Textes de Malika Bouabdellah
Photographies de Boualem Hammouche
(Alger, Mama/Fiac, 2010)
–Issiakhem
de Benamar Mediene
(Alger, Casbah, 2007)
–Issiakhem, la face oubliée de l’artiste (oeuvre graphique)
Sous la direction de Djaafar Inal
Texte de Nadira Laggoune-Aklouche
Photographies de Boualem Hammouche
(Alger, Édition à compte d’auteur, 2007)
–Les Porteurs d’orage (récit)
de Benamar Mediene
(Croissy-Beaubourg, Aden, 2003)
–Les Jumeaux de Nedjma (récit)
de Benamar Mediene
(Paris, Publisud, 1998)
–La Peinture par les mots
de Malika Bouabdellah
(Alger, Musée national des Beaux-Arts, 1994)
–Issiakhem (Album)
(Alger, Bouchène, 1988)
–Algérie, expressions multiples (Catalogue)
(Paris, ADEIAO, 1987)
–M’hamed Issiakhem (Catalogue)
(Alger, Office Riadh el-Feth, 1986)
Aucune
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